Castetbon Pierre et Jacques

Salles Mongiscard

Pierre Castetbon (1) est né à Salles Mongiscard le 24 octobre 1871 et Jacques à Sarpourenx, maison Moulia, le 7 novembre 1876. Leurs parents, Jean et Angélique Lalanne, étaient originaires de Salies. C’étaient des métayers qui devaient parfois chercher une nouvelle métairie quand leur bail venait à expiration.

Jean Castetbon et Angélique Lalanne se sont mariés à Salies le 29 novembre 1862. Ils ont eu dix enfants, de 1863 à 1883. Quatre sont nés à Salies, deux à Salles Mongiscard et quatre à Sarpourenx. On les retrouve ensuite à Arthez.

Les enfants Castetbon

Pierre était le cinquième et Jacques le huitième. Les deux frères sont partis à Bordeaux, un peu avant 1900. Après avoir travaillé dans plusieurs hôtels, Jacques se marie le 13 février 1900 avec Marie Adolphine Berthe Le Pestipon, native de Lorient, âgée de 23 ans ; il est valet de chambre et elle est repasseuse. Ils auront un enfant qui mourra assez vite. Malheureusement Marie Le Pestipon décède. Jacques se remarie le 23 janvier 1904 avec Jeanne Icart native de Fabas (Ariège).

Les deux frères ne sont pas les premiers à quitter leur famille pour Bordeaux.

Leur sœur aînée Marie s’est mariée à Bordeaux dès 1882 avec Jean Pierre Germa, garçon de café, originaire de Tignac (Ariège).

Marie Elisa a épousé Pierre Robin employé de commerce originaire de la Lozère toujours à Bordeaux le 19 janvier 1899.

Félicie née en 1869 a épousé Paul Texier à Caudéran le 23 septembre 1899

Marie née en 1878 s’est mariée à Mérignac le 11 août 1898 avec Jacques Tessier. Elle est décédée à la Rochelle en 1953.

Félix est décédé au Bouscat en 1964. Après la guerre de 14, il a fait une belle carrière militaire chez les tirailleurs marocains la terminant au grade de lieutenant.

Pierre, né en 1871 est resté célibataire.

Des dix enfants de Jean Castetbon et Angélique Lalanne, seuls, Jean Baptiste né en 1867 et Blaise né en 1875 resteront en Béarn. On retrouve le premier à Audéjos en 1894 où il se marie, le deuxième suit ses parents à Arthez.

Cette fin de dix-neuvième siècle voit un exode rural incroyable. On part vers Bordeaux, Paris et l’Amérique, on part pour être employé des chemins de fer, garde barrière, garçon de café ou femme de chambre. Si on veut comprendre cet exode, il faut lire « La fin des terroirs » d’Eugen Weber.

Vers l’Argentine

Le 7 avril 1904, Jacques est domicilié à Buenos Aires au numéro 1260 Calle Artes. En octobre 1904, naît à Bordeaux leur premier enfant, Marie Jacqueline. Jacques est donc parti seul.

En mars 1905, les deux frères Castetbon : Pierre et Jacques sont domiciliés à Buenos Aires.

Jacques Castetbon, Jeanne Icart et cinq de leurs enfants (le sixième est mort en bas âge).

Quand la famille était réunie autour de la table, les parents chantaient la Marseillaise. Mais la coutume s’est vite perdue

Jacques a débuté sa nouvelle vie par un emploi de chauffeur, sa femme étant cuisinière. Ils ont eu six enfants, mais seuls quatre d’entre eux ont des descendants. On dit dans la famille que Jacques envoyait sa femme accoucher en France, qu’elle y est restée de 1911 à 1915, avec ses enfants. Mais la déclaration de guerre l’a décidé à rapatrier sa femme et ses enfants en Argentine car il était classé insoumis. A leur arrivée en Argentine, les enfants ont eu du mal à s’insérer, ils parlaient peu l’espagnol.

Bien que resté célibataire, Pierre a réussi son adaptation puisqu’il a acheté une propriété qu’il a louée à un neveu. Quand il allait se faire payer le loyer, il mangeait avec la famille. Avant de mourir, il a légué ses biens à une nièce qui l’avait recueilli. Nous ne savons pas à quel âge il est mort.

La descendance de Jacques

Marie, fille aînée de Jacques, a épousé un inspecteur scolaire. Ses trois filles ont été institutrices.

Julio Guillermo a quitté sa famille à 18 ans. Il installait des ascenseurs avec ses frères Felipe et Juan. En 1942, il a créé une entreprise de fabrication de pompes submersibles. Ce fut une réussite mais qui périclita assez vite. Julio a eu cinq enfants.

L’aînée, Azucena, que nous avons rencontrée, a également réussi car elle tenait un magasin de cadeaux et son mari possédait une usine de résines et vernis. Mais il est mort jeune.

Le deuxième, Julio Felipe a travaillé avec son père à l’usine de pompes. Il a trois filles, l’une vit à San José (Costa Rica) une autre à Los Angeles. Marcela la troisième est restée à Buenos Aires où elle tient une agence de voyages. C’est grâce à elle que nous avons découvert cette histoire.

Un jour, elle eût l’idée de chercher sur les réseaux sociaux en tapant notre nom. Elle a établi un contact avec notre fils. Nous avons pris le relais et, chose surprenante, nous avons fait se découvrir des porteurs du nom qui s’ignoraient mutuellement. Marcela a organisé notre séjour dans son pays.

La troisième Ana Maria a un élevage de chiens bergers, son mari est importateur de produits chinois et ses enfants sont éducatrice, vétérinaire ou commerçant.

La quatrième Maria Cristina tient un magasin de confection, son mari gère une entreprise d’articles sanitaires. Les enfants travaillent avec leurs parents.

Margot, troisième enfant de Jacques, mariée à un fonctionnaire, a tenu un salon de coiffure. Ses enfants ont fait des études supérieures et tiennent des librairies dans plusieurs villes. C’est elle qui a hérité de son oncle Pierre.

Nous ne savons pas ce que sont devenus le quatrième enfant (le cinquième est décédé en bas âge).

Juan Bautista a installé des ascenseurs avec ses frères Felipe et Julio. Puis il a fondé une fabrique de sèche-cheveux et a tenu un magasin, genre bazar. De ses trois enfants nous n’avons rencontré que le deuxième Jorge électricien et père de Silvina qui nous a accueillis et est venue deux fois en France.

Roger et Michelle Castetbon avec Silvana et Marcela, leurs cousines argentines.

Il faut dire qu’en 1946, au moment de l’arrivée de Péron au pouvoir, la tribu Castetbon s’est scindée en partisans et adversaires du nouveau gouvernement : les uns, influencés par la personnalité d’Evita, le considérant comme défenseur des pauvres, les autres récusant son pouvoir trop autoritaire.

Que peut-on conclure de cette saga ?

Jacques et son frère Pierre, n’ont pas voulu vivre la même chose que leurs parents et n’ont pas hésité à partir vers l’inconnu. Ils peuvent remercier leurs parents et Jules Ferry qui a instauré l’école obligatoire, car ils savent tous signer, même les filles qui sont parties à Bordeaux. Dans certaines familles, cette obligation n’était pas respectée et les autorités n’intervenaient pas toujours. Or l’instruction, même sommaire est un atout indispensable si l’on veut réussir.

Quand on regarde ce que sont devenus leurs descendants, on peut dire qu’ils ont réussi. Bien sûr en ce moment, l’Argentine ne va pas bien fort, mais ils font partie de ceux qui résistent le mieux. La plus exposée est sans doute Marcela avec son agence de voyages.

L’autre constatation est que le pays d’origine est rapidement oublié. Personne n’a appris le français. Ils sont tous devenus argentins. On observe donc le même phénomène que celui des migrations inter-provinces : les bretons, les basques, les béarnais partis à Bordeaux ou Paris n’ont pas transmis leur langue d’origine à leurs enfants. Ils sont devenus pleinement français.

Texte et photos de Roger Castetbon.

(1) Quelques mots sur le patronyme Castetbon. On en trouve dans le Gers, à Labastide-Clairence et Bedous (mais sous la forme Casteigbon). Il y a aussi les descendants d’enfants trouvés nés à Castetbon, auxquels on a donné le nom de la commune. Celui qui nous intéresse a une autre origine. Vers 1730 un habitant de Castetbon est parti à Bellocq, sans doute n’a-t-il pas compris ce qu’on lui demandait quand il a déclaré la naissance de sa fille Anne, on l’a appelé « de Castetbon ». Il n’est pas devenu noble pour autant.

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